Le bilan, l’impact et les traitements des infections « froides » à mycobactéries

Qui d’entre nous n’a pas été en contact avec des animaux domestiques, parfois porteurs de tiques que l’on a enlevées sans précautions. Qui d’entre nous peut certifier n’avoir jamais été mordu par l’une d’entre elle lors d’une belle après midi sur l’herbe ? Qui d’entre nous n’a pas séjourné un jour dans une ferme ou il a bu du lait cru ou s’est est émerveillé devant une volière remplie d’oiseaux chatoyants… ?

Qui d’entre nous peut certifier ne jamais avoir été mordu par une tique ? Ou même avoir eu un jour une fièvre inexpliquée qui suivit une petite lésion cutanée, érythémateuse, de quelques centimètres de diamètre, après un pique-nique romantique ?

Pour réduire les risques de morsure de tique lors d’une promenade en forêt, portez des vêtements longs couvrants et fermés et si besoin utilisez des répulsifs en zone infectée. « La mesure la plus importante au retour d’une promenade est de vérifier qu’une tique n’a pas élu domicile  sur notre peau –notamment au niveau des aisselles, des plis du genou, du haut des cuisses ou du cuir chevelu, insiste le Professeur STAHL,  dans une interview au « Figaro Santé » du 9 août 2010 (…) « Il faut surveiller l’apparition de signes annonciateurs de la maladie de Lyme. C’est le cas si dans les jours qui suivent une fièvre, un anneau rouge de plusieurs centimètres de diamètre ayant tendance à s’étendre apparaissent ».

En cas de morsure récente, désinfectez immédiatement, retirez la tique sans l’endormir (comme on le préconisait jadis), avec un crochet spécial vendu en pharmacie ou à défaut une pince à épiler, désinfectez avec un antiseptique sans alcool et consultez immédiatement  votre médecin qui vous prescrira le traitement antibiotique approprié.

N’hésitez pas  demander lui  de vous prescrire, dans les trente à soixante jours qui suivent, une sérologie des borrélioses. En cas de positivité il vous donnera sans attendre un traitement spécifique, car tous les symptômes que nous allons voir ci-dessous peuvent survenir des semaines ou des mois après l’infection primaire ainsi que les complications neurologiques et/ou cardiaques plus graves et plus tardives.

Ces infections se révèlent par des symptômes de type vasculaire ce qui facilite leur diagnostic clinique mais justifie également leur traitement.

L’impact vasculaire des rickettsies, chlamydias et borrelias doit être souligné, précise le Philippe BOTTERO spécialiste de ces infections :  vascularites chroniques obstructives ; inflammatoires ; sécrétions de toxines vasoconstrictives ayant pour conséquence : une mauvaise nutrition cellulaire, une anoxie, une multiplicité d’ anomalies biochimiques induites pouvant elles-mêmes créer des toxines nocives, des déplétions du système immunitaire et engendrer un  cercle vicieux pathologique entre la bactérie et ses conséquences tissulaires.

Le docteur Philippe RAYMOND qui collabore avec le docteur Philippe BOTTERO depuis 1986, en particulier sur l’autisme, insiste sur certains symptômes qui doivent être présents avant d’être éventuellement confirmés par un bilan biologique :

  • Troubles visuels atypiques (flou visuel intermittent, ombres visuelles fugaces,  phosphènes, traits, photophobie excessive …)
  • Jambes lourdes, indépendamment de troubles veineux, particulièrement le soir, mais parfois le matin,
  • Crampes nocturnes ou de repos
  • Myoclonies ou sursauts d’endormissement  Il s’agit de  sursauts pendant la phase d’endormissement, vécus comme  « l’impression de  tomber »
  • « Impatience » des jambes, diurne – Attention, il ne s’agit  pas du  SJSR (syndrome des jambes sans repos) qui  est vespéral ou nocturne, incontrôlable, associé à sensations neurologiques anormales, obligeant à se lever … Cette « impatience » est diurne ; elle survient en position assise ; Elle est très  fréquente et connue de tous. C’est une trémulation de la jambe (et du talon), de haut en bas. Ce mouvement est automatique, mais  peut être contrôlé (stoppé).
  • Fasciculation  d’une paupière.  La  paupière « frétille » de façon passagère. Généralement considéré comme un signe  de fatigue psychique ou physique, ou carence magnésique, mais devient  très significatif s’il est pluri-hebdomadaire depuis plusieurs  trimestres.
  • Besoin d’inspirer profondément (sensation de  « manque d’air »). Il s’agit d’une  oppression thoracique,  soulagée par une  grande inspiration ou bien une expiration profonde (plus rarement). Cela ressemble  à un « gros  soupir ». Les patients reconnaissent ce symptôme  immédiatement quand  vous le  mimez ! Il est souvent  pluri-quotidien et toujours vécu comme la conséquence d’un état de stress psychique.
  • Prurit cutané (démangeaisons) Prurit sine materia … sans éruption ni érythème…On peut voir tous les stades: Soit diffus et intenses avec lésions de grattage, très invalidants, soit de simples démangeaisons localisées, significatives, s’il s’agit toujours de la même zone et si elles sont quotidiennes (souvent vespérales). Les zones concernées sont: cuir chevelu, avant-bras, crête tibiale, lobe de l’oreille, nuque…
  • Arthralgies ou myalgies migratrices, ou tendinites multiples.  Il s’agit là aussi d’un symptôme très évocateur : les patients  décrivent un  point douloureux, localisé  à  une articulation, qui dure quelques secondes, minutes, ou heures sans  raison,  quelquefois intense mais cédant spontanément. Quelques dizaines de minutes plus tard, un nouveau point douloureux apparaît dans une autre articulation. Cela se répète plusieurs fois par jour. Le patient décrit ainsi des douleurs articulaires mobiles, fugaces,  gênantes mais sans substratum anatomique ni biologique pour le médecin qui considère ces douleurs comme fonctionnelles; d’autant qu’elles sont souvent associées  aux autres symptômes qui sont eux aussi d’allure fonctionnelle. Ce sont ces fameux patients qui ont toujours « mal partout » ! Moins fréquemment, il peut aussi s’agir de zone douloureuse  musculaire, ou tendineuse (patients avec tendinites multiples, syndromes douloureux chroniques…); à  l’extrême, ces points douloureux sont permanents et miment  un syndrome fibromyalgique.
  • Irritations oculaires, irritations pharyngées chroniques, irritations gastriques qui doivent faire rechercher la présence d’un germe particulier: helicobacter pylorri.
  • Bouffées brutales de transpiration sans rapport avec le stress ou la ménopause
  • Brutal besoin d’air, envie d’ouvrir les fenêtres.

Tous ces signes expriment bien le côté vasculaire et anoxique de ces infections. Ils expliquent également les améliorations constatées chez des patients que l’on croyait atteints de démence (vasculaire ou Alzheimer) et qui n’avaient en fait que des troubles vasculaires.

Il y ajoute un cortège de signes plus psychiques qu’il va falloir bien différencier de symptômes psychiatriques :

  • Asthénies, coups de pompe inattendus, obligation de s’arrêter, de s’assoir, de s’allonger voir de dormir.
  • Diverses formes d’anxiété inexpliquée voire d’épisodes quasiment dépressifs avec souvent des troubles du sommeil,
  • Chez les patients autistes l’imagerie a montré l’existence de troubles circulatoires cérébraux en accord avec l’impact vasculaire des bactéries précédemment citées.

Le SFC (syndrome de fatigue chronique), parfois appelé neurasthénie,  neuromyasthénie épidémique, encéphalomyélite myalgique, est sans conteste, dans notre environnement la forme clinique la plus courante de l’infection par ces néo rickettsies.  Il toucherait en France 15 à 20% de la population et plus souvent des femmes de 30 à 50 ans, mais on peut le trouver à tout âge, même chez des enfants. Il remplit les consultations des généralistes et fait couler beaucoup d’encre sur  ses origines : syndrome de sensibilité chimique multiple, l’hypoglycémie, candidose chronique, le syndrome d’hyperventilation, les vapeurs, la mononucléose chronique, l’infection par le virus d’Epstein Barr, le syndrome de fatigue post-virale….

Quelques « épidémies » de fatigue chronique ont été décrites dans l’histoire de la médecine. L’une à Los Angeles en 1934 qui avait nécessité l’hospitalisation d’un grand nombre de malades au « Los Angeles County Hospital ». Plus récemment une série de patients concernés par cette affection a été décrite, en 1985, à Incline village au Nevada, une autre en Islande au IXXe siècle qui toucha le personnel soignant, la fameuse  « fièvre des montagnes rocheuses, diagnostiquée dés 1930 et survenant partout sur le continent américain, qui, elle est bien attribuée à l’infection rickettsienne.

Enfin n’oublions pas que le typhus (rickettsie) a décimé dans un passé plus ou moins récent, des conquêtes romaines aux camps de concentration, encore plus  que les canons et les fusils.

Il s’agit d’une fatigue répétée et récurrente qui ne disparaît ni avec le repos ni avec des thérapeutiques classiques de psychotoniques, antiasthéniques, magnésium, ni d’antidépresseurs souvent prescrits à tort. Cette fatigue n’est pas non plus améliorée par d’éventuelles substitutions hormonales. Elle s’accompagne souvent de douleurs musculaires (qui la fait confondre avec la fibromyalgie, suspecte d’ailleurs des mêmes origines infectieuses), de poussées de ganglions, de maux de tête, de troubles du sommeil… bref de beaucoup de symptômes que nous avons précédemment décrits.

Ce qui permet de le différencier de la dépression, c’est son apparition souvent brutale chez des personnes précédemment en parfaite santé, voir des athlètes ou des chefs d’entreprise…  On le dépiste mieux si l’on comprend que l’ensemble des symptômes est lié à l’anoxie cellulaire qui est la conséquence des dégâts intracellulaires causés par les rickettsies.

Ce qui permet encore mieux de les reconnaître,  c’est une petite phrase, presque toujours la même : « Je ne comprends pas, je suis passionné par mon métier, mes études, ma vie…. Mais je n’y arrive pas, mon corps est lourd dès le matin, je pèse une tonne, je m’allonge et me relève aussi fatigué, je peux dormir 24 heures sans être reposé…. Je veux, mais ne peux pas. »

Les traitements sont faits de cures alternées de divers antibiotiques afin d’une part, d’éviter de produire des résistances et d’autre part de cibler un maximum de germes possibles. Les macrolides et les cyclines sont proposés en première intention mais on les associe parfois aux quinolones et au metronidazole. Tout cette « stratégie » doit être adaptée à chaque patient, à son type de symptôme, et à ses réactions au traitement. Ces alternances de différents molécules pendant des périodes relativement brèves, de sept à dix jours, devront être maintenues, puis espacées, mais parfois sur plusieurs mois ou années, en tous cas jusqu’à ce que les symptômes disparaissent. Il a été démontré que prescrits de cette façon, les anti-infectieux n’induisaient pas de résistances.

D’autres traitements, autres que les antibiotiques, comme les huiles essentielles, les extraits de pépin de pamplemousse, l’argent colloïdal ou certaines plantes sont à l’étude mais il semble que pour beaucoup de situations le traitement antibiotique soit en partie incontournable.

Il est cependant très important de savoir qu’une « réaction d’Herxheimer (HR) » est toujours possible en début de traitement. Elle peut survenir entre le 5e et le 15e jour de traitement et est de grande valeur aussi bien sur le plan diagnostic que pronostic car elle démontre que les antibiotiques ont visé juste et que les toxines des germes se répandent dans l’organisme. Elle peut se manifester par un état grippal avec des céphalées très importantes, des douleurs gastriques et digestives, mais elle diminue de cure en cure jusqu’à disparaître. On propose alors deux ou trois bains chauds de vingt minutes (ou saunas ou hammams) de l’exercice physique, afin d’augmenter les éliminations cutanées dans la transpiration. Parfois on a recours à l’aspirine et rarement à de faibles doses pendant quelques jours de corticoïdes, mais il faut surtout dédramatiser, bien savoir qu’il ne faut pas arrêter le traitement et que tout cela est de très bonne augure.

(Extraits en partie de « MIEUX QUE GUERIR » paru fin 2011 aux éditions « Josette LYON »)

Avec les confrères cités ci-dessus, quelques autres et des chercheurs nous avons fondé, autour du Professeur MONTAGNIER, un groupe de recherche et d’échanges de pratiques cliniques et diagnostiques CHRONIMED.

A lire également du Professeur Luc MONTAGNIER, Prix Nobel de Médecine:  » Les combats de la vie, mieux que guérir, prévenir »